Dans les laboratoires du Losange, on invente le véhicule de livraison de demain. Seul ou en «train», EZ-PRO ouvre de belle perspectives

Vous nous connaissez, on préfère de loin un véhicule à volant, à pédales voire, même, à vitesses manuelles. Un engin dont on maîtrise tous les paramètres et à qui on dicte sa volonté. Mais il faut bien l’admettre: nous sommes des dinosaures. Et les dinosaures se sont éteints, alors… Alors il faut le reconnaître: dans un futur plus si lointain, la voiture reprendra à son compte tout ou partie de la «conduite» et nous ne serons plus qu’une sorte de «lest», que ladite voiture transportera et amènera à bon port.

Mais bon, si on pouvait quand même parcourir quelques kilomètres en «mode manuel», ça ne nous déplairait pas. C’est dire si, en matière de véhicule autonome, on regarde avec un regard un peu plus bienveillant des solutions qui se destinent au transport… de marchandises. Et en matière de camionnette de transport du futur, Renault vient de faire très fort en présentant EZ-PRO. EZ-PRO? Un engin étonnant, à mi-chemin entre le van de livraison, le container à roulettes et un véhicule tout droit sorti d'»Alien» ou de la «Guerre des Étoiles».

Le concept? Aussi simple que génial: imaginer le véhicule de livraison qui, dans les derniers kilomètres – entendez dans les zones urbaines voire péri-urbaines – transportera des marchandises de façon autonome, programmée et, surtout, sans polluer sur site, puisque 100% électrique. Les avantages sont évidents: diminution de la congestion du trafic – le principal Graal promis par la mobilité autonome – et des émissions nocives en zones habitées.

Présenté à la foire des véhicules commerciaux de Hannovre, le concept EZ-PRO est capable de tout cela. Imaginez-le comme une sorte de «container à roulettes», avec un «concierge humain», selon le terme même de Renault. Assis dans un cockpit vitré, ledit concierge peut, via un joystick, reprendre les commandes de l’engin en cas de besoin mais, de façon générale, EZ-PRO fait tout, tout seul. Et la particularité du bidule, c’est de pouvoir être «accouplé» à d’autres unités, sans chauffeur elles, pour former un véritable «train roulant» capable de livrer toutes sortes de marchandises, n’importe où en ville.

Mais EZ-PRO peut aussi être aménagé en food-truck, en atelier mobile ou en n’importe quelle structure mobile dont un artisan pourrait avoir besoin. On vous l’avait dit: simple et génial. L’engin parfait pour les postiers ou les livreurs en tous genres. Autre avantage, les clients pourraient choisir l’heure et l’endroit de la livraison et suivre, en tout temps, la progression de leur colis sur n’importe quel smartphone ou tablette.  

Le «concierge», lui, serait libéré de la conduite pour mieux pouvoir se concentrer sur la gestion du parcours, le contrôle de son «train» et, pourquoi pas, la livraison finale du colis, dans la mesure où EZ-PRO n’est pas encore capable… de monter un escalier ou de prendre l’ascenseur. Pour autant, ce concept n’est pas l’ébauche finale d’un modèle prêt à être commercialisé. Comme le relève Philippe Divine, le directeur de la stratégie des véhicules commerciaux légers de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, «Il faut plutôt le voir comme un exemple de ce que notre technologie actuelle nous permet de faire et des pistes que nous explorons. 

Une chose est sûre, la plupart des experts – et des grands patrons des groupes constructeurs d’ailleurs – s’accordent sur un point: le domaine des véhicules de livraison est le domaine idéal pour expérimenter les technologies de véhicules autonomes et, partant, de les rendre assez populaires et fiables pour, ensuite, les introduire dans le domaine de la mobilité privée. 

Pour en revenir de façon une peu plus précise à EZ-PRO, chaque module mesure 4,8 m de long, 2,1 m de large et 2,2 m de haut, et possède un empattement de 3,8 m. Le module avec «concierge»  pèse 2,5 tonnes à vide, les modules purement fonctionnels 2,8 tonnes et leur capacité de charge est de 12 mètres cube ou deux tonnes. L’autonomie annoncée? 300 kilomètres. Et la batterie pourrait se recharger, en route, par induction, soit par des stations idoines aux lieux de livraison/chargement soit directement incluses dans la chaussée (Renault travaille sur un tel projet avec Qualcomm). Et EZ-PRO à beau n’être qu’un concept, le Losange a déjà passé à un stade de recherche plus avancé que la seule théorie. «Nous ne sommes pas des spécialistes de la logistique, relève Philippe Divine, mais notre technologie est évolutive. Donc nous avons été chercher conseil auprès de professionnels, pour avoir leur avis et définir leurs besoins spécifiques. ET quand on sait que lesdits professionnels s’appellent DPD (4,8 millions de colis distribués quotidiennement) ou Lomi (qui a mis sur pied un système de «cafés mobiles» dans Paris, on se dit que Renault n’entend pas s’arrêter là. La preuve? Le Losange a même déjà de quoi fêter le succès quand il arrivera: les champagnes Piper-Heidsieck font aussi partie ds «béta-testeurs»…