Avec sa 600LT Spider, McLaren fait un pas de géant dans la cour des supersportives. Précision, explosivité et puissance ravageuse en font une redoutable chasseuse de chronos

Déjà à l’arrêt, cette voiture a quelque chose de magnétique. Ses formes acérées, son museau rasant le bitume et ses larges ouïes dans les portières trahissent une nature qu’on devine ravageuse. Et quand on appuie sur le bouton start, la symphonie qui se dégage de ses deux pots d’échappement surélevés prédisent que les minutes qui vont suivre seront inoubliables.

C’était il y a un peu plus de deux semaines, quelque part près de Phoenix, en Arizona. Entre une montagne et une base de l’US Air Force, le petit circuit Arizona Motorsports ne paie pas franchement de mine. De fait, le paysage alentour est d’une platitude très banale et le «circuit» n’a pas d’infrastructures. Si ce n’est un… parking. Plat.

Pourtant, McLaren ne l’a pas choisi par hasard. Si les gens de Woking ont choisi l’Arizona, c’est parce que l’Amérique du Nord est le marché principal pour McLaren. D’ailleurs, la collection de voitures appartenant à des clients qui nous accueille à l’arrivée en dit long sur la passion des Américains pour les belles Anglaises. Une 650S Spider, une 675 LT Spider, une 570S GT4 et même une… P1: les «petits» cabrios 600 LT sont bientôt entourés.

C’est pourtant pour eux qu’on est là. Pour les pousser dans leurs retranchements tant il est vrai que ce n’est pas durant les deux heures et demi de route qu’il nous a fallu pour rejoindre le circuit qu’on aura pu le faire. Les limitations de vitesses US et… la vigilances des shérifs bridant assez vite toute velléité de fantaisie. Mais sur le circuit, c’est «no limits». Ça tombe bien: la 600LT a été conçue pour ça. Pour amener la «Sport Series» aux limites supérieures de ce que la technologie peut offrir, sans avoir recours, comme dans la «Super Series», à une suspension ou à des appendices aérodynamiques actifs. Au bout de deux fois vingt minutes, le verdict est sans appel: le travail des ingénieurs a fait mouche. Superlégère, dotée de plus d’appui aérodynamique, de plus de puissance et de plus de couple, cette 600 «Long Tail» est une redoutable chasseuse de chronos.

Mais revenons au début. Casqué, habillé d’une veste à longue manches (c’est un cabriolet, on va donc tourner «ouvert»), on écoute attentivement les consigne de notre instructeur qui, courageusement (ou inconsciemment…) est assis sur le siège passager. D’emblée, il nous met dans l’ambiance en plaçant la voiture en mode Sport, c’est-à-dire avec une intervention restreinte des assistants et de l’ESP. Les deux premiers tours sont fastidieux. Il faut assimiler 16 virages, avec très peu de points de repères, en même temps qu’il faut dompter la bête. Puis on augmente la cadence. Et plus la session se poursuit, plus on apprécie le travail des ingénieurs qui ont conçu ce petit bijou. Fini la direction floue, ou le museau musardeur qui, sur les premiers modèles de la marque, semblait chercher sa voie. Ici, on fait dans le très haut de gamme. La direction, ultra directe, est d’une précision chirurgicale et le petit volant remonte toutes les informations instantanément. Le châssis est radical et le freinage aussi efficace et facilement dosable qu’endurent. Et le moteur… Ah, le moteur… Un V8 de 3,8 litres, à double turbo, qui n’attend qu’un pression de l’accélérateur pour lâcher la bride à ses 600 chevaux. Ce qu’il fait d’autant plus volontiers que le couple de 620 Nm est disponibles dès 5500 tours/minute déjà.

Inutile de dire qu’à ce petit jeu, l’aiguille n’a pas souvent le temps de cesser de flirter avec la zone rouge. Sur la piste, c’est impressionnant. Et sous le casque, ça bouillonne. Loin de se laisser impressionner, le «copilote» n’a qu’un mot à la bouche: «plus vite». À croire que, le soir, il récite la devise de Coubertin comme un mantra. Plus haut, plus vite, plus fort… De fait, ça fonctionne! Les trajectoires qu’on ânonnait au début se lissent, la conduite s’affine et la vitesse de passage en courbe commence à défier les lois de la physique.

Une petite pause bienvenue a permis de faire redescendre la fréquence cardiaque de l’apprenti pilote. Ca tombe bien: l’instructeur n’a pas l’air prêt à baisser la garde pour la deuxième session. La preuve, il vient de mettre la voiture en mode «Track». Là, prévient-il, il va falloir jouer fin à la réaccélération: plus de filet d’assistance, l’ESP est en mode «non intrusif». Un coup de gaz trop optimiste se terminera par un travers… Mais la magie du châssis opère. La 600LT, rue, se déhanche, vibre, mais passe. Toujours plus vite. Infiniment plus vite sans que, jamais, on ait le sentiment qu’on perd le contrôle de la manœuvre. Magnifique. Grisant. Joueuse, légère, facile, précise et efficace, la voiture nous donne l’impression d’avoir fait des progrès stupéfiants en matière de pilotage. Ce n’est évidemment qu’une illusion: on ne conduit pas mieux qu’avant, c’est juste que la voiture, elle, tutoie la perfection.

D’ailleurs elle ne cache pas son jeu. Tout, à bord, a été pensé avec l’efficacité maximale en point de mire. Ne cherchez pas d’artifices de confort, de sièges ultra moelleux ou de buse de chauffage dans le cou. Si vous voulez une voiture «polyvalente» et un zeste plus civilisée, allez voir du côté de la 720S spider qui, elle, est plus accueillante. À bord de la 600LT, le superflu n’a pas sa place! Mais le strict nécessaire qu’on y trouve la rend tellement attachante, tellement efficace et tellement satisfaisante que nous n’aurions pas l’outrecuidance de lui demander, en plus, de nous fournir une climatisation bi-zone ou un porte-gobelet refroidissant.

Et, pour être tout à fait honnête, maîtriser la conduite de ce missile sol-sol demande un tel degré de concentration permanente qu’on n’a pas vraiment de temps à perdre à chercher un quelconque bouton qui commanderait l’accès à ses e-mails ou la mise en place d’un store obscurcissant… C’est pour cela que McLaren a pu, sans autres, économiser 100 kg par rapport au poids de la 570S Spider: 21 kg sur les sièges, 17 kg sur les jantes et les pneus, 12.6 kg sur la climatisation, 12,6 kg sur les échappements, 10,2 kg sur les composants de suspension, 7,2 kg sur les éléments en carbone de la carrosserie et des appendices aérodynamiques, 4 kg sur l’Alcantara et les tapis intérieurs, 4 kg sur le système de freinage, 3,3 kg sur les différents câblages, 3,3 kg sur le système audio/GPS, 1,4 kg sur le pare-brise, 1 kg sur le vide-poches, 3,66 kg de moins encore sur les sièges, 300 g sur le revêtement intérieur, 1,2 kg sur les lames avant et 420 g avec les boulons de roues en titane si vous choisissez le pack «Plus Clubsport». Ce qui permet d’absorber les 3,5 kg supplémentaires que pèse l’aileron aérodynamique arrière renforcé et gagner, en tout, 99,7 kg.

Reste que, pour radicale et exclusive qu’elle soit, la 600LT reste incroyablement facile à conduire. Ce qu’on a préféré? Outre son formidable potentiel d’accélération, bien sûr, c’est sa direction qui nous a fait craquer. Parce que les progrès effectués par Mc Laren en la matière depuis la MP4-12C sont tout bonnement hallucinants. Fini l’ultra-assistance qui faisait ressembler la conduite à un tour de PlayStation. À bord de la 600LT, on bénéficie d’un volant aussi précis qu’un scalpel. Guidée avec d’une façon si tranchante, la 600LT colle à la ligne et n’en bouge plus.

On apprécie alors à sa juste valeur l’incroyable rigidité du châssis monocoque en carbone et la qualité phénoménale de la suspension indépendante active dotée de trois modes: Normal, Sport et Track. En naviguant entre ces trois modes et les trois modes de commandes de la boîte, on peut ainsi paramétrer avec une précision extrême le comportement de la voiture. Et l’adapter à des condition de conduite aussi différentes qu’une balade à travers les plaines désertiques de l’Arizona ou le sprint effréné sur circuit.

Un jour entier au volant n’aura pourtant pas eu raison de notre bonne humeur. Le froid matinal, alors qu’on roulait décapoté, ne s’est pas terminé en méchant rhume. Et le retour «viril» de la suspension n’aura pas fait crier grâce à nos lombaires même après près de 300 km. Conclusion: le superflu sacrifié n’altère en rien le nécessaire embarqué. Cette voiture est tout simplement géniale. C’est tout…

FICHE TECHNIQUE

Moteur: M838TE, 3.8 litres, twin-turbo, 3799 cm3
Puissance: 600 ch à 7500 tr/min
Couple maxi: 620 Nm de 5500 à 6500 tr/min
Boîte: 7 rapports SSG, mode Normal, Sport et Track
Direction: assistée, électro-hydraulique
Châssis: monocoque MonoCell II en fibre de carbone, avec zones déformables avant et arrière en aluminium
Freins: Disques en carbone-céramique, 390 mm à l’AV, 380 mm à l’AR. Étriers en aluminium, 6 pistons à l’AV, 4 pistons à l’AR
Jantes: 8j x 19 à l’AV, 11j x 20 à l’AR
Pneus: Pirelli P-ZERO Trofeo R 225/35/R19 à l’AV, 285/35/R20 à l’AR

Dimensions
Lxlxh: 4,604 x 2,095 x1,196 m
Empattement: 2,670 m
Poids à sec: 1297 kg
Poids tous pleins: 1404 kg
Capacité du réservoir: 72 l
Coffre: 150 l

Performances
0-100 km/h: 2»9
0-200 km/h: 8»4
Vitesse maxi: 324 km/h
200-0 km/h: 121 m (!)
100-0 km/h: 32 m (!)

Consommation WLTP
Mixte normalisée: 12,2 l/100 km
CO2: 276 g/km

Assistants
ABS, contrôle de stabilité dynamique électronique DESC, Contrôle de traction TC, assistant de démarrage en côte, assistance au freinage, pré-remplissage du circuit de freinage, cruise control, frein de parcage électrique.

Infotainement
Écran tactile de 7 pouces à contrôle vocal, connectivité USB, McLaren Track Telemetry (MTT) avec fonction de temps au tour

Prix de base
278 000 francs