Proposée aux enchères par Sotheby’s, une voiture dessinée par Ferdinand Porsche s’est pris un bide magistral en Californie. À cause d’un stupide malentendu…

Un commissaire-priseur néerlandais et un responsable web américain qui ne distingue pas les nuances subtiles de l’anglais prononcé avec un petit accent hollandais: il n’en a pas fallu plus pour faire capoter l'»enchère du siècle» comme la qualifiaient certains observateurs. L’objet du délire? Une Porsche Type 64 de 1939. Enfin, quand on dit Porsche…

C’est que tout, autour de cet engin, sent le soufre Un peu comme si les dieux de l’automobile eux-mêmes s’étaient opposés à cette vente. Car si cet étonnant croisement entre une voiture, un avion et une fusée a été bien dessiné par Ferdinand Porsche, son moteur et la plupart de ses pièces viennent de chez VW, d’autres venant de plusieurs constructeurs de l’époque, y compris… Fiat! De là à dire que la Type 64 est une Porsche, l’affirmation fait bondir certains puristes. A fortiori quand on sait que la marque Porsche n’a été fondée qu’en 1948, soit 10 ans après que la Type 64 a été fabriquée. Les connaisseurs sont donc formels: la vraie «première» Porsche est et reste la 356 Gmuend Coupe de 1948. Point!

Et puis il y a la face sombre de Ferdinand Porsche qui, en 1939, est membre du parti nazi et de sa branche militaire les SS. De quoi jeter une ombre sur cet engin construit à seulement 3 exemplaires et qui, par certains côtés, préfigure déjà nettement tant la future VW Coccinelle que la Porsche 911. Passons.

https://www.abc.net.au/news/2019-08-20/the-screen-operator-misheard-the-auctioneer%E2%80%99s/11430752

Et revenons à l’enchère de Sotheby’s à Monterey en Californie. Devant un parterre surchauffé, Maarten ten Holder, le commissaire-priseur, annonce la mise de base à 17 millions de dollars. Fatale méprise, le proposé qui retranscrit les données sur l’écran géant comprend mal le «seventeen (17) millions» du Néerlandais et l’affiche… «seventy (70) millions». C’est l’émeute! Du public jaillissent les «no way!» (pas question!), «is worth that money?» (ça vaut ce prix?), «what a scam!» (quelle arnaque!), «they just slit their own throat » (ils se sont tranché la gorge tout seuls!) et autres «bouuuuh», quolibets, sifflets et noms d’oiseaux. La confusion est totale.

Sous les yeux de son assesseur au regard paniqué, le commissaire-priseur a beau tenter de rassurer l’audience en martelant, «C’est 17, pas 70! 17 millions, je répète 17 millions…» Le mal est fait. Et la vente est morte.

Aux dernières nouvelles, la voiture est toujours indiquée comme «en vente» sur le site de Sotheby’s qui s’est excusée en soulignant que c’était une «regrettable erreur, amplifiée par une audience surexcitée. Dès le début des enchères, les incréments ont été mal indiqués sur l’écran entraînant une malheureuse confusion dans la salle. C’est une erreur regrettable et totalement involontaire.» Dont acte.

Reste que l’infortunée Type 64 n’aura pas été la seule victime du week-end. Pour preuve, une autre vedette de cette vente, une McLaren F1 dont on attendait qu’elle se négocie autour des 23 millions, a péniblement été adjugée à 19,805 millions. Les spécialistes parlent d’un «bain de sang» pour qualifier les enchères de voitures de collections. Les temps sont durs pour les collectionneurs. Et pour les spéculateurs.